Livestock Research for Rural Development 27 (1) 2015 Guide for preparation of papers LRRD Newsletter

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Analyse du mode de conduite des élevages bovins laitiers dans le Nord-Est Algérien

Loutfi Ghoribi, Charaf Bensari, Zouhir Djerrou, Hadria Djaaleb, Foulla Riachi, Imen Djaaleb et Mohamed El-Hadi Chibat1

Institut des Sciences Vétérinaires El-Khroub, Université Constantine 1 Algérie
loutfiveto@yahoo.fr
1 Institut des Sciences Mathématiques, Université Constantine 1 Algérie.

Résumé

Notre étude a porté sur la gestion des exploitations bovines laitières dans 4 wilayas du Nord-Est Algérien (Constantine, Jijel, Mila et Souk Ahras), afin de chercher des facteurs susceptibles de limiter ou de freiner les performances de reproduction et de production laitière. L’enquête a porté sur un effectif global de 2231 vaches laitières, réparties sur 123 troupeaux.

Les résultats ont montré que les élevages ont une production laitière moyenne faible (15 litres par jour). Ceci est le résultat d’une mauvaise gestion de l’alimentation, traduite par un rationnement dans 44% des fermes ; dont 62% en début de lactation. De plus, le manque de suivi de la reproduction est reflété par des délais de mise à la reproduction non conformes aux normes dans 41% des cas ; et des inséminations après manifestation des chaleurs précoces (32%) ou tardives (34%). L’observation des chaleurs est souvent occasionnelle (52%) et dure 20 minutes dans 18% des exploitations. Le diagnostic de gestation, établi tardivement à partir du 3ème mois dans 52% des fermes, est basé sur le non retour des chaleurs. L’évaluation de l’état corporel se fait majoritairement par l’éleveur et de façon visuelle. La durée de tarissement est optimale dans 68% seulement des cas. La politique de réforme pratiquée dans 67% des fermes est dominée par des motifs liés à l’âge. Enfin, la faible intégration des biotechnologies de la reproduction et le manque de mécanisation des équipements engendrent des surcoûts de production.

Mots-clés: alimentation, gestion, reproduction



Management of dairy cattle farms in North-eastern Algeria

Summary

Our study focused on the management of dairy cattle farms in four governorates of the North Eastern Algeria (Constantine, Jijel, Mila and Souk Ahras), to identify factors that may limit or inhibit reproductive performance and milk production. The survey covered a total of 2231 dairy cows spread over 123 herds.T

The results showed that the farms have a low average milk production (15 liters per day). This is the result of poor feeding management, reflected by a rationing in 44 % of farms and 62% in early lactation. In addition, the lack of monitoring of reproduction is reflected by the calving interval to first breeding not according to target in 41% of case and insemination after estrus manifestation early (32%) or late (34%). The herd management is characterized by occasional estrus detection (52%) and duration of 20 minutes in 18% of farms. Pregnancy diagnosis established late in the 3rd month in 52% of farms is based on the non return of estrus. The evaluation of the body condition is made visually mainly by the farmer. The duration of the dry period is optimal in only 68%. Culling policy practiced in 67 % of farms is dominated by reasons related to age. Finally, the low integration of reproductive biotechnologies and lack of mechanization equipment increases costs of production.

Keywords: feeding, management, reproduction


Introduction

Les relations physiologiques entre la production, la nutrition et la reproduction sont complexes et multifactorielles. Les systèmes de production laitière varient en raison des différences d’environnement, des économies de nutrition, des coûts relatifs du travail, de l'élevage, du contrôle de la production de lait et de la disponibilité de l'infrastructure. Ces différences de systèmes auront une incidence sur la performance de reproduction et la rentabilité des interventions de reproduction et de technologies. La performance du troupeau dépend de la vache, de la nutrition et de la gestion (Mcdougall 2006). L'efficacité réelle de la reproduction dans tout troupeau laitier est fortement influencée par les soins et l'attention fournis par le gestionnaire et les acteurs impliqués dans la santé du troupeau et l'approvisionnement alimentaire (Plaizer et al 1997). La gestion des facteurs de l’exploitation comportant la détection des œstrus, la période d'attente volontaire, le stockage de sperme et sa mise en place dans le tractus génital modifiera également la performance de reproduction (Westwood et al 2002).

L’objectif de notre étude est une enquête sur le mode de conduite des élevages bovins laitiers dans le Nord-Est Algérien, afin de rechercher des facteurs susceptibles de limiter ou de freiner les performances de reproduction et de production.


Méthodologie

L’enquête a été conduite auprès de 123 fermes, regroupant 2231 vaches laitières, situées dans les wilayas de Constantine, Mila, Jijel et Souk Ahras au Nord-Est algérien. Le choix des fermes a été fait de manière aléatoire et selon la disponibilité de coopération à cette étude. Notre enquête s’est étalée de septembre 2012 à mars 2013. Pour la mener, nous avons établi un questionnaire qui aborde les principaux domaines relatifs à l’exploitation bovine laitière tels que les différents aspects de l’alimentation, de la reproduction et de la conduite de l’élevage. Les données ont été codifiées et les pourcentages ont été calculés pour les différentes rubriques telles que l’alimentation, la reproduction et la conduite de l’élevage. L'analyse descriptive a été organisée et exploitée grâce au logiciel Excel (version 2007).


Résultats

Données générales

Les 123 troupeaux sont composés de vaches dites améliorées issues de l’insémination de la race locale brune de l’atlas avec de la semence importée (50%), de vaches importées (37%) et seulement 12% de vaches de race locale. Les vaches importées d’Europe sont de races Frisonne française, Holstein, Tarentaise, Montbéliarde et Simmental allemande. L’identification se fait principalement (98%) par des boucles auriculaires chez ceux qui identifient leurs animaux (80%). Il est à noter que certains éleveurs utilisent des marqueurs délébiles, ce qui rend difficile ou impossible l’observation de l’identité des vaches. La majorité des fermes pratique la stabulation entravée. La production laitière moyenne par vache et par jour dans les fermes enquêtées est de 15 litres et la durée de la lactation par vache varie de 8 à 10 mois (Tableau 1).

Tableau 1 : Données générales.

Constantine

Jijel

Mila

Souk Ahras

Région

Vaches laitières (%)

Locales

7

13

24

7

12

Importées

42

49

36

7

37

Améliorées

51

38

40

87

50

Effectifs

1111

253

627

240

2231

Nombre de fermes

49

22

32

20

123

Type d’identification (%)

Oui

71

91

81

90

80

Ardoise

6

0

0

0

2

Boucle auriculaire

94

100

100

100

98

Marquage sur la robe

0

0

0

0

0

Système électronique

0

0

0

0

0

Type de stabulation (%)

Libres

39

0

3

0

16

Entravée

61

100

97

100

84

Production laitière (Moyenne ± Ecart-type)

Moyenne/jour/vache (litres)

16 ± 5,61

15 ± 5,34

15 ± 5,50

11 ± 3,03

15 ± 5,44

Durée moyenne de la lactation (mois)

8 ± 1,30

8 ± 0,30

10 ± 0,71

8 ± 1,22

9 ± 1,26

Conduite de l’alimentation

La majorité des exploitations disposent d’un pâturage. La ration est composée essentiellement de concentré, de fourrage sec, fourrage en vert, à moindre degré de paille et peu ou pas d’ensilage. Très peu de fermes ont recours à des additifs alimentaires. La distribution des aliments est exclusivement manuelle et l’alimentation est rationnée dans presque la moitié (44%) des fermes. L’alimentation à l’appréciation et standard sont pratiquées à parts égales (20%). Les 2/3 des exploitations pratiquent un rationnement en rapport avec l’état corporel; et ceci se fait essentiellement (60%) en début de lactation et à moindre degré (21%) au tarissement (Tableau 2).

Tableau 2 : Conduite de l’alimentation.

Constantine

Jijel

Mila

Souk Ahras

Région

Y a-t-il un pâturage ? (%)

Oui

86

95

88

100

90

Mode d’alimentation (%)

Manuel

100

100

100

100

100

Mécanique

0

0

0

0

0

Automatique

0

0

0

0

0

Mode de distribution des aliments (%)

A Volonté

29

0

16

0

15

Rationnée

65

73

19

0

44

A l’appréciation

2

27

50

15

21

Standard

4

0

16

85

20

Ration en rapport avec l’état corporel (%)

Oui (%)

84

77

81

30

73

Phases physiologiques (%)

Début de lactation

54

59

77

67

62

Fin de gestation

5

18

0

0

6

Tarissement

39

0

4

33

21

Indéfini

2

24

19

0

11

Conduite de la reproduction

Un peu plus d’une ferme sur dix (13%) observe un repos volontaire de 90 jours après la mise bas, alors que 28% le font entre 30 et 40 jours. Cinquante neuf pourcent (59%) des fermes ont un repos volontaire compris entre 50 et 60 jours. La moitié des exploitations pratique la saillie naturelle, alors que le recours à l’insémination artificielle n’est que de 28%. Aucune ferme n’utilise le transfert embryonnaire. L’insémination artificielle est réalisée essentiellement par des vétérinaires, seules 5% sont pratiquées par des techniciens, alors qu’aucun éleveur ne l’entreprend. Les inséminations sont réalisées dès la manifestation des chaleurs dans 32%, et après 30 heures dans 34% des exploitations (Tableau 3).

Tableau 3 : Conduite de la reproduction.

Constantine

Jijel

Mila

Souk Ahras

Région

Y a-t-il un repos volontaire après le part ? (%)

Oui

92

100

88

90

92

Durée du repos volontaire (%)

30 jours

29

9

0

0

13

40 jours

16

32

11

0

15

50 jours

27

41

25

0

25

60 jours

20

18

32

89

34

90 jours

9

0

32

11

13

Mode de reproduction (%)

SN

51

23

41

100

51

IA

27

45

38

0

28

SN et IA

22

32

22

0

20

Transfert embryonnaire

0

0

0

0

0

Réalisation de l’insémination artificielle par (%)

Vétérinaire

92

100

95

0

95

Technicien

8

0

5

0

5

Eleveur

0

0

0

0

0

Intervalle entre chaleurs et insémination ou saillie (%)

De suite

49

27

0

60

34

6 h

18

41

41

40

32

12 h

20

14

41

0

21

18 h

6

18

13

0

9

24 h

4

0

6

0

3

30h

2

0

0

0

1

SN : Saillie Naturelle, IA : Insémination Artificielle.

La conduite de l’élevage
La collecte des informations

Un peu plus de la moitié (59%) des éleveurs notent les événements liés à la reproduction. Parmi ceux qui collectent des données, la plupart (68%) le font sur un registre, alors que très peu de fermes (4%) utilisent un support informatisé (Tableau 4).

Tableau 4 : Collecte des événements liés à la reproduction.

Constantine

Jijel

Mila

Souk Ahras

Région

Collecte des informations (%)

Oui

43

45

81

80

59

Moyens de collecte (%)

Planning d’étable

14

0

8

6

8

Feuille

38

40

8

0

19

Registre

33

60

85

94

68

Micro-ordinateur

14

0

0

0

4

La détection des chaleurs

Presque la totalité des fermes pratiquent la détection des chaleurs et parmi celles-là, (52%) la font de façon occasionnelle. Dans la moitié des cas (52%), la durée d’observation est de 10 minutes et seulement de 20 minutes pour 18 %. Cette observation se fait essentiellement dans les pâturages (41%) et les étables (31%) ; et à moindre degré au niveau des aires d’exercice. Les chaleurs sont identifiées principalement par le chevauchement, le beuglement et l’agitation.

Tableau 5 : La détection des chaleurs.

Constantine

Jijel

Mila

Souk Ahras

Région

Détection des chaleurs (%)

Oui

98

95

100

100

98

Fréquence de détection (%)

1/jour

31

52

50

0

35

2/jour

8

29

9

0

11

3/jour

6

0

0

0

2

1/mois

0

0

0

0

0

Occasionnelle

54

19

41

100

52

Durée d’observation (%)

10 minutes

56

86

56

0

52

20 minutes

17

10

38

0

18

30 minutes

6

0

6

0

4

40 minutes

0

5

0

0

1

Indéfinie

21

0

0

100

25

Lieu d’observation (%)

Aire d’exercice

21

0

44

0

20

Salle de traite

6

0

3

0

3

Etable

33

48

13

40

31

Pâturage

35

52

41

45

41

Indéfini

4

0

0

15

4

Le diagnostic de gestation

La majorité des fermes (97%) font le diagnostic de gestation, et parmi ceux-là, 52% le pratique tardivement à partir de 3 mois. Par contre, (48%) réalise le constat de gestation dans un délai plus précoce compris entre 1 et 2 mois. Ce diagnostic est établi dans 56% des cas par l’éleveur et 39% par le vétérinaire. Le non retour de chaleurs (40%) et le fouiller rectal (28%) sont les principaux moyens de diagnostic de gestation. Les méthodes ancestrales restent encore pratiquées dans un cas sur cinq (19%). L’échographie est pratiquée dans une ferme sur dix (Tableau 6).

Tableau 6: Le diagnostic de gestation.

Constantine

Jijel

Mila

Souk Ahras

Est

Diagnostic de gestation

Oui

94

95

100

100

97

Moments du diagnostic

1er mois

20

10

22

85

29

2ème mois

37

0

16

5

19

3ème mois

33

81

63

5

45

4ème mois

11

10

0

5

7

Le diagnostic de gestation est établi par (%)

Vétérinaire

24

62

72

0

39

Eleveur

70

33

25

100

56

Technicien

7

5

3

0

4

Moyens de diagnostic de gestation (%)

Non retour chaleur

43

10

22

95

40

Dosage progestérone

0

0

0

0

0

Echographie

24

0

6

0

11

Fouiller rectal

4

71

50

0

28

Palpation abdominale

2

0

0

5

2

Ancestrale

26

19

22

0

19

L’évaluation de l’état corporel

L’évaluation de l’état corporel est réalisée dans 2 fermes sur 3. Dans la plupart des cas (93%), c’est l’éleveur qui la réalise. Elle est essentiellement (99%) visuelle et s’effectue principalement (57%) en début de lactation. Cette évaluation se fait dans 16% et 14% des cas dans respectivement les périodes de vêlage et tarissement (Tableau 7).

Tableau 7 : L’évaluation de l’état corporel.

Constantine

Jijel

Mila

Souk Ahras

Région

Evaluation de l’état corporel (%)

Oui

90

100

6

95

71

Réalisée par (%)

Vétérinaire

2

9

50

5

6

Technicien

2

0

0

0

1

Eleveur

95

91

50

90

93

Moyens d’évaluation (%)

Mesure du pli cutané

0

0

0

0

0

Echographie

0

0

0

0

0

Pesée

2

0

0

0

1

Evaluation de l’état d’embonpoint

0

0

0

0

0

Evaluation visuelle

98

100

100

100

99

Moments d’évaluation (%)

Vêlage

16

27

50

0

16

Début de lactation

43

64

50

84

57

Milieu de lactation

14

5

0

0

8

Fin de lactation

5

0

0

0

2

Tarissement

20

0

0

16

14

Non défini

2

5

0

0

2

Le tarissement

Le tarissement pratiqué de façon progressive est réalisé par plus des 2/3 des éleveurs au 7ème mois. Les résultats enregistrés montrent, que 12% des durées de tarissement sont courtes (moins de 30 jours), 21% sont longues (plus de 60 jours) et 68% comprises entre 40 et 60 jours (Tableau 8).

Tableau 8 : Le tarissement.

Constantine

Jijel

Mila

Souk Ahras

Région

Tarissement (%)

Oui

94

100

100

85

95

Moments de tarissement (%)

6ème mois

4

9

6

29

9

7ème mois

74

91

88

53

78

8ème mois

22

0

6

18

13

Méthodes de tarissement (%)

Brutale

4

14

0

6

5

Progressive

96

86

100

94

95

Durées du tarissement (%)

20 jours

2

0

0

6

2

30 jours

0

14

16

24

10

40 jours

15

18

16

6

15

50 jours

43

32

28

6

32

60 jours

24

23

16

24

21

70 jours

15

14

25

29

20

80 jours

0

0

0

6

1

La réforme

Dans les fermes enquêtées, 67% pratiquent une politique de réforme des animaux. Les motifs de réforme sont principalement l’âge (41%), suivi par la pathologie (25%) et l’infertilité (24%). Le taux (10%) de réforme pour défaut de production est le plus faible (Tableau 9).

Tableau 9 : Réforme.

Constantine

Jijel

Mila

Souk Ahras

Région

Réforme (%)

Oui

76

77

31

95

67

Motifs de réforme (%)

Age

43

0

20

84

41

Pathologie

19

71

10

5

25

Infertilité

22

29

60

5

24

Défaut de production

16

0

10

5

10


Discussion

Données générales

Le type d’identification utilisé rend la collecte des événements liés aux animaux incertaine, et parfois erronée. L’identification est non seulement utile pour la gestion du troupeau, mais aussi dans la traçabilité. Le meilleur système est l’utilisation de grandes marques claires ou des numéros sur les deux faces de l’animal. L'exactitude de détection peut être faible pour les raisons de mauvaise ou absence d’identification (Bonnes et al 2005). La stabulation entravée prédomine dans la majorité des fermes, ceci, n’est pas de nature à favoriser la manifestation de chaleurs. Malgré des troupeaux composés en majorité de vaches spécialisées dans la spéculation laitière, la production laitière reste très faible (15 litres en moyenne) par rapport à leur potentiel génétique. La moyenne de production laitière journalière des vaches (15 litres) est très proche de celle (16 litres) enregistrée par Ghozlane et al (2003), et est supérieure à celle (9,5 litres) renseignée par Belhadia et al (2013). L'amélioration de la production passe entre autres par une meilleure expression du potentiel des races sélectionnées grâce à une amélioration de l'alimentation (Kayouli et al 1989).

Conduite de l’alimentation

Malgré la disposition de pâturages pour la majorité des fermes, l’alimentation reste déficiente en fourrage vert. La plupart des exploitations observent une période creuse d’affouragement en vert (Ghozlane et al 2003). L’absence d’utilisation d’ensilage dans les exploitations enquêtées, concorde avec ce qui a été rapporté par Belkheir et al (2011). L'amélioration de la nutrition de la vache au cours de la période qui entoure le part, peut réduire la mobilisation des tissus, améliorer l’ingestion de matière sèche, la santé et la production de lait (Park et al 2002). L’alimentation est différente d'une exploitation à une autre selon la nature des ressources alimentaires disponibles, la région et aussi selon la saison (Guerra 2008, Belhadia et al 2013). Il n’y a pas de gestion de l’alimentation, puisque plus de la moitié des exploitations ne font pas de rationnement en rapport avec les différentes phases physiologiques. Enfin, l’absence de mécanisation de l’alimentation engendre un surcoût de la production. Tous ces facteurs accumulés pourraient faire partie des causes qui expliquent les mauvaises performances de production et de reproduction.

Conduite de la reproduction

Nos résultats montrent que le repos volontaire est différent d’une ferme à une autre ; puisque ce délai est court (30 à 40 jours), ou est long (90 jours) dans respectivement 28% et 13% des fermes. Le repos volontaire est conforme aux normes recommandées (50 à 60 jours) dans 59% des fermes. L’obtention d’une fertilité et d’une fécondité optimales, dépend du choix et de la réalisation par l’éleveur d’une première insémination au meilleur moment du post-partum. En effet, la fertilité augmente progressivement jusqu’au 60ème jour du post-partum, se maintient entre le 60ème et le 120 ème jour ; puis diminue par la suite (Hanzen 1994). Souvent les problèmes se produisent chez les vaches saillies à moins de 60 jours après le part (Bonnes et al 2005). D’autre part, l’insémination artificielle réalisée essentiellement par le vétérinaire, rend cette biotechnologie peu ou pas utilisée. De plus, le timing des inséminations par rapport à la manifestation des chaleurs est inadéquat, il est soit précoce (53%), soit très tardif (38%). Il est dans les normes recommandées (12 h) dans seulement 9% des cas. D’après Hanzen (1994), il est recommandé de respecter un intervalle moyen de 12 heures entre la détection des chaleurs et l’insémination.

La conduite de l’élevage
La collecte des informations

Le mode de stockage des informations ne permet pas une bonne conservation des données pour un éventuel constat ou suivi dans la mesure ou, 41% des fermes ne collectent pas les informations liées à la reproduction. Les mauvaises performances chez les bovins laitiers sont liées à une absence de planning d’étable et de bilan de fécondité (Ghozlane et al 2003, Belhadia et al 2013). L'établissement de meilleurs systèmes de collecte de données est l'une des premières mesures pour tenter d'améliorer les performances d'un troupeau (Mcdougall 2006). L’aide à la décision se rapporte aux systèmes d'information, la clef de la réussite d'un système d’aide à la décision est la disponibilité des données de routine de hautes qualités (Roche et al 2009).

La détection des chaleurs

Les résultats obtenus révèlent une faible fréquence de détection des chaleurs, puisque 52% des éleveurs observent leurs vaches occasionnellement, contre 11% seulement qui la pratiquent deux fois par jour. De même, la durée d’observation est faible, elle est de 20 minutes dans seulement 18% des fermes. Pour obtenir une bonne détection des chaleurs, de nombreux facteurs doivent être pris en compte, la vache doit exprimer l'œstrus et l'éleveur doit le détecter (Roelofs et al 2010). Mise à part le beuglement et le chevauchement, les autres signes d’identification des chaleurs sont peu utilisés. Olds (1990), rapporte que l’une des meilleures voies pour augmenter le taux de conception est d’enseigner aux éleveurs comment reconnaître l’œstrus avec un maximum de précision. De plus, lorsque les dates de vêlages, l'identification des vaches et les dates de chaleurs sont enregistrées, l'efficacité de la détection des chaleurs peut être dépistée (Roelofs et al 2010).

Le diagnostic de gestation

Le diagnostic de gestation est établi tardivement, puisque 52% des exploitants confirment la fécondation à partir du 3ème mois. Le non retour de chaleur utilisé dans presque la moitié des cas n’est pas un diagnostic de certitude. Le constat de gestation doit se pratiquer de façon précoce afin de pouvoir détecter et traiter les cas d’infertilité à un moment opportun. Le contrôle de gestation à un intervalle plus long qu’un mois augmentera le nombre d’animaux en reproduction dans le troupeau dû à un manque d’identification des vaches en gestation (Kirk, 1980).

L’évaluation de l’état corporel

L’évaluation de l’état corporel faite par l’éleveur de façon subjective, n’est pas pratiquée régulièrement. D’après Bewley (2008), la disponibilité de notes de l’état d’embonpoint enregistrées à intervalles réguliers, permet au producteur laitier de déterminer la meilleure stratégie pour gérer les réserves de l'organisme du troupeau. Notre enquête a montré que cette évaluation est réalisée dans plus de la moitié des cas en début de lactation. Alors que le moment crucial pour évaluer la condition corporelle se situe entre le milieu et la fin de la lactation, ceci est important, car c’est le moment le plus probable pour le producteur laitier d’intervenir et de corriger les problèmes d'état d’embonpoint d'un animal (Bewley et al 2008). De plus, Le recours à la notation d’état corporel pour contrôler le statut énergétique, s’est révélé être un moyen intéressant pour suivre la reprise de l’activité ovarienne des vaches laitières en période postpartum (Radhwane et al 2013).

Le tarissement

Nos résultats montrent que 33% des exploitations ont des durées de tarissement soit trop courtes soit trop longues. Des durées de moins de 30 jours pourraient entraîner une perte importante de la production (Velasco et al 2008) et du rendement laitier (Pinedo et al 2011). Par contre, les longues périodes de tarissement augmentent les risques de mammites sub-cliniques en début de lactation et ont une corrélation négative avec la performance de reproduction (Pinedo et al 2011).

La réforme

Seul, les deux tiers des exploitations pratiquent une politique de réforme des animaux. La réforme est l'une des décisions les plus complexes de la gestion des animaux de ferme, elle fait partie de la gestion du troupeau (Monti et al 1999). Pour que les données soient précises, les motifs de réforme doivent être enregistrés lorsque la vache quitte le troupeau (Etherington et al 1991). Les données ne peuvent pas être analysées indépendamment de la réforme (Bewley et al 2008).


Conclusion

Cette enquête nous a permis de dévoiler certains aspects de la conduite des élevages bovins laitiers dans le Nord-Est algérien.


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Received 13 July 2014; Accepted 9 November 2014; Published 1 January 2015

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